Le 29 octobre, journée mondiale de Cyrus Le Grand
Le 29 octobre, c’est la journée internationale de Cyrus le Grand, le fondateur de l’empire perse Achéménide, le premier en date des empires indo–européens de l’histoire, précédant ainsi les empires grec et romain.
C’est par la prise de Babylone par Cyrus, en 539 av. J. -C., qu’il met fin à l’empire babylonien, maitre de l’Asie occidentale et fonde l’empire perse, s’étendant de l’Inde à Carthage, du Caucase et du Danube à l’Ethiopie.
L’acte de naissance de l’empire perse fut le célèbre « édit » du roi Cyrus publié au lendemain de la chute de Babylone.
Par cet édit Cyrus le Grand proclame l’égalité des droits pour tous les membres de l’empire ainsi que la liberté de pensée et de croyance pour tous les individus, instaurant ainsi une ère nouvelle de respect des droits humains fondamentaux et abolissant le droit de vie et de mort des vainqueurs sur les vaincus, en vigueur dans toutes les civilisations. Cet édit est encore aujourd’hui d’une valeur inégalée pour l’ensemble de l’humanité, puisqu’il est la première Déclaration des droits de l’Homme de l’histoire. Voici quelques extraits :
« Je suis Cyrus, roi du monde, grand roi, puissant roi, roi de Babylone, roi de Sumer et d’Akkad, roi des quatre quarts … Ma vaste armée marcha sur Babylone en paix ; je ne permis à personne d’effrayer les peuples de Sumer et d’Akkad. J’ai recherché le bien-être de la ville de Babylone et de tous ses centres sacrés. Pour ce qui est des citoyens de Babylone, auxquels Nabonide avait imposé une corvée n’étant pas le souhait des dieux et ne […] convenant guère [aux citoyens], je soulageai leur lassitude et les libérai de leur service. »
En application de ces principes annoncées, dès sa prise de Babylone, il libère les Juifs réduits en esclaves et leur restitue tous leurs biens confisqués par le dernier souverain oppresseur Nabonide. Il les charge de la mission de retourner dans leur pays d’origine devenu provinces perses de Judée, Samarie, et d’y reconstruire le Temple de Jérusalem détruit par le roi babylonien.
Vingt-cinq siècles plus tard, Cyrus demeure l’archétype du bon et juste souverain pour les peuples formant l’actuel et les anciens territoires iraniens de l’Asie central. Symbole de justice et d’égalité entre les peuples de l’empire, Cyrus est d’autant plus vénéré aujourd’hui que le pays n’a jamais souffert autant de l’inégalité entre sexes, ethnies, religions, et de la répression culturelle et politique, imposant une lecture oppressive et intégriste du chiisme devenu l’instrument d’une domination politique sans partage fondée sur la répression !
L’histoire de Norouz
Les Origines
Norouz est sans doute la fête la plus importante et peut-être la plus ancienne de l’Iran. A propos des origines de cette fête, les chercheurs ont plusieurs avis, qui parfois divergent quelque peu, mais trouvent tous son origine dans des rites et traditions ancestrales persanes.
Bien qu’elle ne soit pas citée dans l’Avesta, livre sacré des Zoroastriens, cette fête a été mentionnée comme fête religieuse dans plusieurs textes datant de la Perse d’avant l’Islam.
Nog routch, forme originelle de Norouz, appartient à l’ancienne langue Pahlavi de l’Iran, langue officielle de l’époque de l’Empire Sassanides (224-615). La première syllabe a été transformée, dans le persan d’aujourd’hui, en “now” (qui signifie nouveau) et dans la deuxième, “tch” s’est transformé en “z” : “Rouz” (qui veut dire jour).
Dans la plupart des textes anciens persans et arabes, est raconté que Norouz a été fondé par Djamshid ou Djam, le 4ème roi de la plus ancienne dynastie légendaire iranienne les Pishdadian.
D’après le récit du Shâhnâmeh de Ferdowsi, le guerrier Djamshid s’était toujours battu contre le mal. C’est à l’issue victorieuse d’une grande bataille qu’il fut couronné roi le jour de Norouz, apportant la liberté et la paix à son peuple. On dit aussi qu’il fabriqua une carriole avec laquelle il monta au ciel, ce qui étonna et rendit joyeux les gens, qui par la suite, célébrèrent cet événement.
Parallèlement à ces histoires fondées sur des croyances populaires, Abu Reyhan Biruni pense que ce nom est choisi parce qu’il représente le “front de la nouvelle année” puisque Norouz célèbre l’équinoxe du printemps et le commencement de la nouvelle année. Dans les textes de Zoroastre, prophète de la Perse antique vivant entre 1000 et 1200 ans avant Jésus-Christ, Norouz est cité comme la fête printanière de tous les peuples iraniens, depuis toujours célébrée. Zoroastre a doté cette fête d’une dimension religieuse et sa célébration est devenue un devoir pour ses fidèles. La communauté des Zoroastriens en Iran a choisi le 6ème jour de Norouz comme jour de l’anniversaire de leur prophète.
La célébration de Norouz dans la Perse antique
Les images taillées sur les murs de Persépolis représentent les émissaires des divers peuples (Grecs, Egyptiens, Babyloniens, Indiens, …) vivant sous le pouvoir des Achéménides (550 – 330 av.J.C) en train d’offrir des présents au roi. Ces images témoignent de la majesté de la célébration de Norouz à l’époque de cette dynastie.
Après la chute de l’empire des Achéménides et l’instauration du pouvoir grec par Alexandre, la Perse connu différents stades d’évolutions culturelles. Il est difficile, étant donné le nombre réduit de textes et de témoignages datant de cette époque, de porter une opinion sur la culture et surtout sur la manière ancienne de célébrer Norouz. Il en est de même en ce qui concerne les cinq cents années de l’empire des Arsacides (250 av.J.-C à 225). Néanmoins, certains faits et indices témoignent de la célébration plus ou moins constante de cette fête, impératif religieux chez les zoroastriens dont la religion a été déclarée la religion officielle de la dynastie des Arsacides. De plus, sous l’empire des Sassanides, Norouz était fêté à grands renforts de rites et de cérémonies grandioses témoignant d’une longue tradition en la matière.
Les écrivains de l’époque islamique qui ont beaucoup cité la dynastie des Sassanides dans leurs textes, décrivent la splendeur avec laquelle cette fête était organisée à la cour et par le peuple. D’après ces textes, les rois cherchaient à rendre le peuple joyeux et les gens chômaient ce jour-là et en profitaient pour se reposer et se divertir. En ce jour, les rois recevaient les tributs et procédaient aux nominations et aux destitutions. Frapper la monnaie, nettoyer les temples du feu, sacrifier, planter des arbres, faire des constructions…faisaient partie des activités auxquelles on s’adonnait en ce jour.
Certains rois comme Ardeshir Babakan, Bahram-é-Gour et Anoushiravan offraient leurs habits au peuple et recevaient des présents en échange. Le roi fixait un jour précis pour recevoir le peuple et personne n’avait le droit d’empêcher les gens d’entrer au palais. On annonçait l’audience publique quelques jours à l’avance pour laisser aux gens le temps de prendre leurs dispositions. Toutes plaintes et requêtes pouvaient y être présentées, même contre le roi lui-même. Les plaintes contre ce dernier étaient examinées par les grands de la cour et de la religion. Les différends entre les gens étaient résolus sur place. L’une des fonctions sociales des fêtes, surtout celle de Norouz, fut et reste la réconciliation de tout un chacun.
Faire pousser des grains de céréales, préparer diverses sucreries et mets, composer et jouer de la musique, chanter des mélodies joyeuses, jouer des pièces de théâtre et s’adonner à différents loisirs, faisaient aussi partie du rituel de ces festivités. A l’époque des Sassanides, il était coutumier d’allumer du feu le soir du nouvel an, d’une part en signe de respect pour cet élément sacré et d’autre part, en raison de la croyance des Perses selon laquelle les âmes des défunts rejoignaient leur famille pour passer Norouz avec eux. Ainsi le feu leur indiquait le chemin de la maison.
L’eau aussi occupe une place importante dans ces rituels en tant qu’élément sacré et source de vie. Au matin de Norouz, les gens s’aspergeaient mutuellement d’eau et devaient se laver avec de l’eau pendant la journée. Cette tradition est certainement liée à Khordad, dieu gardien de l’eau et de la végétation, à qui on a dédié le sixième jour de chaque mois.
Norouz en Perse islamique
Les gens continuèrent à célébrer Norouz après la venue de l’Islam mais il reste très peu d’informations quant aux modalités de ces célébrations.
Norouz chez les Abbassides
Les sources historiques rapportent qu’au début de la dynastie des Abbassides (750-1258), Norouz était une fête officielle et nationale, et ses rituels étaient respectés. Motevakel Abassi -l’un des rois de cette époque- faisait frapper, à chaque Norouz et spécialement pour la fête, cinq millions de Dirhams en pièces multicolores, qu’il ordonnait de jeter sur les gens, pour faire comme les rois de la Perse antique. Ces mêmes sources relatent que les gens embellissaient leur maison et se rassemblaient dans les rues en mettant des habits neufs et précieux pour allumer du feu, manger des plats et des gâteaux et s’amuser pendant les six jours que durait la fête.
Les dynasties perses
Toutefois, certains des émirs abbassides essayèrent, en vain, de réduire les festivités de Norouz et d’en effacer certains rites. Lorsque les dynasties perses montèrent au pouvoir et s’efforcèrent à faire renaître la culture perse et les coutumes nationales, Norouz fut célébré avec une telle splendeur que même la terrible attaque des Moghols ne put lui porter atteinte. Selon les poèmes datant de cette époque, les gens firent de Norouz un symbole de la grandeur et de la magnificence de la Perse et défendirent avec son aide leur indépendance.
Les voyageurs européens à l’époque des Séfévides (1501 – 1736) rapportent dans leurs récits de voyage des détails de la splendeur avec laquelle cette fête était célébrée.
L’attention portée par les savants chiites dans leurs textes aux récits concernant Norouz témoigne de l’ampleur religieuse qu’avait prise cette fête, en plus de son importance nationale.
Norouz de nos jours
Norouz est la seule fête issue de l’antique Perse qui reste actuellement célébrée de façon officielle dans tout le pays, moyennant quelques retouches. Dans la célébration de cette fête, d’anciennes coutumes ont été conservées : faire pousser des grains de céréales ; nettoyer de fond en comble la maison ; acheter des vêtements neufs ; sauter par-dessus le feu (tchahar-shanbeh-souri) pour se prémunir contre les maladies ; rassembler le haft-sin la veille de Norouz, c’est-à-dire sept choses dont les noms commencent en « S » :
• sekkeh (pièce d’or, symbole de prospérité)
• serkeh (vinaigre,symbole de l’âge et la patience )
• sabzeh (verdure, symbole de la renaissance et la vie)
• senjed (fruit séché du jujubier, symbole de l’amour)
• samanou (sorte de halva, symbole de l’abondance)
• sib (pomme, symbole de la beauté et de la santé),
• sir (ail, symbole de la santé)
• sonbol (jacinthe, l’arrivée du printemps)
• somagh (sumac symbole la couleur du lever du soleil)
auxquels on ajoute des œufs colorés/peints (symbole de la fertilité), des bougies (symbole de bonheur, chaleur), et un miroir (symbole de luminosité), un récipient d’eau (symbole de la pureté) et un bocal de poisson rouge (symbole de la vie), un livre sacré : le Coran, la Bible, la Torah ou l’Avesta ou encore un livre de poésie le Shâhnâmeh ou le Divân de Hâfez qui évoquent la grâce de Dieu. Rassembler ces haft sin sur une nappe décorée la veille de Norouz n’est que l’expression de remerciement et de reconnaissance envers des biens octroyés par le Créateur.
Le dernier jeudi de l’an, les Iraniens vont au cimetière et offrent à manger à ceux qui prient pour leurs morts.
Les derniers jours avant le nouvel an, on voit deux personnages fictifs du folklore iranien arpentant les rues, Amou Norouz (oncle Norouz) avec une barbe et des cheveux gris et un haut chapeau et Hadji Firouz maquillé de noir, vêtu de rouge et muni d’un tambourin, qui chantent et dansent en souhaitant leurs bons vœux pour la nouvelle année. Les gens leur donnent alors des pièces de monnaie afin de les aider en cette veille de nouvel an. Après le Tchahar-shanbeh-souri (la veille du dernier mercredi de l’année), tout est prêt pour Norouz.
Au moment du nouvel an, toute la famille se rassemble, quelle que soit l’heure, autour du haft-sin, vêtus de beaux vêtements neufs. A l’annonce du nouvel an (jadis marquée par un coup de canon et aujourd’hui par la voix des médias) commencent les embrassades familiales et les offrandes de cadeaux.
L’heure de la nouvelle année passée, c’est le rituel des visites. On rend visite aux proches et aux amis en vue de leur souhaiter les meilleurs vœux pour l’année qui débute. On renoue des liens avec les “perdus de vue”, on tente d’effacer les malentendus, etc… en commençant par les plus âgés. On ne reste pas plus d’une demi-heure et on en profite pour présenter les vœux, manger des pâtisseries et des fruits, boire du thé. Le principe de réciprocité des visites doit être strictement respecté. Cette tournée fulgurante a un attrait tout particulier pour les enfants : «Eydi», étrenne en Persan. A chaque étape, des billets flambants neufs sont distribués par les plus âgés au plus jeunes.
Les plats principaux traditionnellement servis à Norouz sont : sabzi polo bâ mâhi (riz avec des herbes hachées et parfumées servi avec du poisson), koukou sabzi (sorte d’omelette aux herbes), réshté polo (riz aux nouilles « réshté » avec raisins secs, dates et poulet), on pense qu’en mangeant du réshté polo on pourra être maître de son destin pour l’année à venir.
Norouz dure douze jours. Le 13e jour les familles vont au “sizda-be-dar”, un grand pique-nique dans la nature avec tous les membres de la famille pour éloigner le mauvais sort attaché au nombre treize et terminer la fête. A la fin de cette journée, les sabzeh cultivés pour le haft sin sont jetés dans de l’eau courante, par exemple dans une rivière pour faire disparaître la maladie et la malchance de l’année qui est en cours. Il est également coutume chez les jeunes filles célibataires de faire un nœud dans le sabzeh afin d’exprimer leur souhait de se marier avant le sizdah bedar de l’année suivante. C’est avec ces préparatifs que les Iraniens accueillent l’arrivée du nouvel an.
Norouz subsiste à travers le temps
Dans la tradition iranienne, il est dit que la création des six éléments principaux de l’existence -le ciel, l’eau, la terre, la végétation, les animaux et l’homme- a préparé un champ de bataille pour Ormuzd, le Bien dans la religion de Zoroastre, et son adversaire Ahriman, le Mal. La préservation de ces éléments est le devoir de la sixième création c’est-à-dire l’homme. Cette pensée trouvait son expression dans les fêtes consacrées, à des dates propices, à chacun de ces éléments. Ces fêtes étaient également organisées en signe de reconnaissance et de remerciement adressés à qui de droit, pour la création de ces éléments, et pour en favoriser la préservation. Les Zoroastriens célébraient toujours ces fêtes auxquelles participaient riches et pauvres sur un pied d’égalité.
Il était question de sept fêtes religieuses, puisque la septième création, c’està-dire le feu, avait également trouvé sa place dans le cortège des rituels. Zoroastre a choisi de célébrer le feu à l’équinoxe du printemps, lorsque l’année se renouvelle, c’est-à-dire à Norouz. Parmi ces anciennes fêtes, seule Norouz, a été préservée jusqu’à nos jours. Chez les Iraniens, Norouz symbolise la fin de la saison d’Ahriman, l’hiver, et annonce l’arrivée de la saison d’Ormuzd, l’été, qui offre au monde une vie nouvelle, un souffle nouveau. Cette fête a également permis aux Iraniens de conserver leur spécificité culturelle en conservant, malgré vents et marées, un lien étroit avec leur passé et leur identité.
Aujourd’hui 300 millions de personnes célèbrent le nouvel an Norouz. Comme c’est une fête ancestrale, les coutumes ont évolué différemment, par exemple en Iran il y a le 7 sin. En Afghanistan il y a 7 fruits sec, au Tadjikistan il y a 7 fruits ou sirops de fruits, mais le blé ou autre céréale germée sont commun partout.
Depuis le 23 février 2009, l’UNESCO a fait de Norouz une journée internationale figurant dans la liste de l’héritage culturel du patrimoine mondial et la décrit comme marquant le nouvel an et le début du printemps dans une zone géographique très étendue, comprenant, entre autres, l’Azerbaïdjan, l’Irak, l’Inde, l’Iran, le Kirghizistan, le Pakistan, la Turquie et l’Ouzbékistan.
auteure: Mitra Dehghan
Bibliographie :
- Mitra Dehghan – Norouz pour les nuls, Gradignan 2011
- Askar Bahrami – Les Fêtes iraniennes, Ed. Bureau des recherches culturelles, Téhéran,2005
- http://anthropologiy.ir
- http:/Unesco.org
- isna.ir
- Ashpazkhuneh.persianblog.ir